La Loi fondamentale du 23 décembre 1990 indiquait en son article 88 que » Les collectivités territoriales de la République sont les préfectures, les communes urbaines et les communautés rurales de développement…. » Et l’article 89 ajoutait que » Les collectivités territoriales s’administrent librement par des conseils élus, sous le contrôle d’un délégué de l’État qui a la charge des intérêts nationaux et du respect des lois ».
En posant la règle de la libre administration des collectivités territoriales par des conseils élus, la Loi fondamentale traduisait dans la réalité l’option prise par le Président Lansana Conté, dans son discours programme du 22 décembre 1985, pour le système de la décentralisation en plus de la déconcentration, pour l’administration du territoire.
Mais l’article 88 suscité comportait une anomalie en ce sens qu’il créait une petite confusion entre la notion de « circonscription territoriale » et celle de collectivité locale « . En effet, la préfecture était et demeure encore une collectivité territoriale et non non une collectivité locale.
Cette anomalie a été corrigée à l’occasion de la révision constitutionnelle du 11 novembre 2001. L’article 88 du texte révisé avait introduit une distinction non négligeable entre ces deux notions.
Le principe de la libre administration par des conseils élus été retenue pour les collectivités locales qu’étaient les communes urbaines et Communautés rurales de développement (CRD). Quant aux circonscriptions territoriales, il s’agissait des régions, des préfectures, des sous- préfectures, des quartiers et des districts.
C’est sur la base de ces dispositions que les premières élections communales ont eu lieu en Guinée sous le régime du Président Lansana Conté.
Pendant ce temps, les responsables des quartiers et districts étaient toujours nommés par décision administrative.
La Constitution du 7 mai 2010 (ou du 19 avril 2010 plus exactement) quant à elle disposait en son article 134 alinéa 3 que « les collectivités locales sont les régions, les communes urbaines et les communes rurales. À l’instar des textes antérieurs, elle a maintenu le principe de la libre administration des collectivités locales par des conseils élus.
Dans la foulée de l’élaboration de la Constitution, le CNT (2010) a adopté la Loi organique n° L001 du 24 mai 2010 portant Code électoral révisé. En son article 98, le législateur a indiqué que les districts et les quartiers sont des sections des collectivités locales. Mais de quelles collectivités locales ? Des régions ou des communes urbaines ou rurales ?
En l’absence de précision, on peut dire de manière raisonnable que les quartiers sont des sections des communes urbaines et les districts des sections des communes rurales. Ce sont donc très logiquement des collectivités locales de base. Ce qui signifie qu’elles s’administrent librement par des conseils élus comme toute collectivité locale.
Et c’est ce que disait exactement l’article 98 du Code électoral révisé de 2010 alors que la Constitution de 2010 ne citait pas les quartiers et districts parmi les collectivités locales. D’où une contradiction entre la norme suprême et le code électoral.
Le 4 février 2018, après plusieurs des années de contestations violemment réprimées, se sont déroulées les deuxièmes élections communales depuis 1984.
Pour l’élection dans les quartiers et districts, des difficultés d’ordre pratique avaient été soulevées par rapport à son organisation matérielle. Pour surmonter ces difficultés, la formule retenue est celle contenue dans l’article 99 du Code électoral révisé de 2017.
Cette formule ne faisait malheureusement pas l’unanimité au sein de la classe politique et de la société civile. Bien que ce mode de désignation des responsables des quartiers et districts ait été consacrée par une loi, il n’a jamais été appliqué.
Si, en dépit de maintes difficultés, la Guinée est parvenue à rendre plus ou moins effective la décentralisation dans les communes, il n’en a pas été ainsi dans les régions ainsi que dans les quartiers et districts.
C’est l’un des problèmes que le CNT devra régler dans les futurs textes nécessaires au retour à l’ordre constitutionnel notamment la Constitution et la loi électorale.
Me Mohamed Traoré
Ancien Bâtonnier
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