De la bonté à la tragédie sur la route de Kankan-Kouroussa: le bilan est lourd ! (Par Balla Moussa Konaté)

Rarement mon émotion a été aussi grande suite à un accident de la circulation, comme ce cas qui vient de se produire dans la nuit du jeudi au vendredi 16 septembre 2022 à 1h45 sur la route Kankan – Kouroussa, à moins de 3 km des premières habitations de la ville de Kouroussa. Le bilan fait état de 14 morts (dont 11 calcinés par le feu), y compris le cadavre, 11 blessés et 2 dégâts matériels importants.

Ce qui rend ce drame particulièrement pathétique, me commande de l’observer sur deux angles de vision.

1) Sur le plan purement de la sécurité routière, l’accident en question a impliqué un camion de marque Hono qui était stationné dos à Kouroussa et un minibus Hiace, venant du côté de Kankan pour Bissikrima via Kouroussa. Il roulait à vive allure lorsqu’avec une relative dégradation de chaussée devant lui, le conducteur du minibus préféra emprunter le contre sens jusqu’à aller heurter involontairement et malheureusement le camion Hono qui était stationné de ce côté. Par la violence du choc, le minibus se renversa sur son côté où la portière de sortie des passagers se trouvait. Pire, ce minibus contenait de l’essence dans des bidons non sécurisés, ce qui a facilité le contact de celui-ci avec les étincelles générées par l’intensité du choc. Le feu embrassa par la suite toute la partie des passagers, sans issue possible même par les fenêtres vitrées qui étaient condamnées par des grilles métalliques dites anti-vols. Les seuls à avoir se sauver avec des blessures étaient ceux qui étaient proches ou assis sur le siège à côté du conducteur. Ce dernier est même sorti indemne de ce drame. Des corps calcinés et méconnaissables furent tour à tour emballés chacun dans un sachet plastique spécial par les agents de la sécurité routière. Il avait fallu la croix rouge et les sapeurs pompiers pour individualiser les autres victimes presque réduites en cendre pour les mettre à leur tour chacun dans un sachet, afin de dresser le bilan ci-dessus.

En guise de compléments de cause, la position de la direction de ce minibus était placée à sa droite, dans ce cas la visibilité axiale du conducteur pouvait être un handicap pour évaluer avec précision les dangers se trouvant au milieu de la chaussée. La fatigue du conducteur aussi est un facteur à prendre en compte négativement.

2) L’autre angle de vue qui rend ce sinistre évènement d’un rare précédent, se trouve dans les circonstances qui ont motivé le déplacement du minibus et de son conducteur, ainsi que du lien entre les victimes.

En effet, selon mes informations, à Kondianankoro dans l’après midi du jeudi 15 septembre 2022, un homme venait de rendre l’âme au centre de santé de la même localité sous les yeux de sa propre jeune sœur qui vivait avec son mari dans la zone. Le couple décida alors avec d’autres parents ressortissants de Bissikrima et environnants d’accompagner ensemble le corps jusqu’à leur village d’origine. Soudain, une panne fut constatée sur le véhicule du défunt qui devait les transporter, un autre conducteur se chargea de ce service avec son minibus, hélas.

Parmi les victimes, il y avait des liens très étroits comme entre la jeune sœur du défunt, son mari et leurs deux enfants qui ont tous péri. Quatre personnes, des proches du défunt, venaient eux aussi du même village (Kolon), près de Bissikrima.

De la perte d’un être cher aux gestes de compassion et de disponibilité, sont des actes de bonté humaine que Seul Dieu détient la juste mesure.

Soyons prudents en toutes circonstances sur la route, car mêmes nos plus grandes largesses peuvent se retrouver dans la gueule d’un accident de la circulation.

Comme dans les précédents cas, hélas, tirons ici encore des leçons suivantes de sécurité routière:

▪︎ Retenir que l’excès de vitesse est un risque majeur d’accident de la route, surtout mortel, et/ ou un facteur aggravant de celui-ci;

▪︎ Éviter de prendre la route dans un état de choc psychologique élevé et de fatigue (conducteur et groupe de passagers compris);

▪︎ Éviter de stationner (on dirait le camion hono était en panne) sans équipement de pré signalisation en triangle;

▪︎ Les phares d’un véhicule doivent être constamment en bon état pour une portée parfaite de visibilité devant soi;

▪︎ Retenir que les véhicules avec direction à droite sont un facteur de risque permanent dans une circulation où la priorité est à droite;

▪︎ Avec des stations d’essence qui pullulent partout, c’est un risque inutile de se déplacer avec des bidons non sécurisés contenant ce carburant.

D’une manière générale, la problématique de la sécurité routière reste pendante dans notre pays. Commençons tout d’abord à prendre collectivement et résolument conscience des méfaits des accidents de la route. Ce serait notre point de départ pour la réussite de toutes les autres stratégies de lutte contre ce fléau.

Paix à l’âme de tous les morts sur nos routes. Prompt rétablissement aux blessés et aux autres victimes des drames routiers.


Par Balla Moussa Konaté, ingénieur ponts et chaussées, spécialiste en sécurité routière

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